Aujourd’hui, on vit de plus en plus longtemps et de mieux en mieux. Grâce au progrès de la médecine, à l’amélioration des conditions de vie et de ressources, l’espérance de vie en France a progressé de 33 ans par rapport au siècle dernier.
Et elle continue ! Chaque année, selon l’Insee, c’est un trimestre de plus de gagné ! Hier, une personne aux cheveux blancs qui soufflait ses cent bougies représentait un fait rarissime. Aujourd’hui, avoir cent ans reste un événement avec visite d’élus, médaille de la ville et bouquets de fleurs. Demain, ce sera banal. Exagéré ? Non, car les chiffres sont là. Étonnants. « Sur les 900 000 assurés sociaux des Alpes-Maritimes, 669 personnes ont, cette année, fêté ou dépassé le cap des cent ans, note Jean-François Gourdon, sous-directeur de la CPAM 06. Parmi elles, 226 vivent à Nice. »
En 1999, l’Insee recensait 121 centenaires à Nice. En onze ans, ce nombre a donc presque doublé et devrait, dans le futur, progresser encore. Du coup, la Ville est en passe de devenir un laboratoire de la longévité. Avec politique dynamique en faveur des seniors, offre multiple d’activités physiques culturelles et des projets innovants à l’étude. Bien sûr, tout le monde n’a pas les mêmes chances de vivre aussi longtemps. Et c’est le sexe dit fort qui s’épuise le plus. 15 % des centenaires sont des hommes contre 85 % de femmes...
Emilie, couturière et suffragette à 103 !
« Mardi ce ne sera pas possible, je reçois des amis. Mercredi et vendredi, non plus, je joue à la belote contrée.» Pour rencontrer Émilie Jouanon, veuve, sans enfant, qui vit seule dans son appartement du Port, il faut s’y prendre à l’avance. Et jongler avec son emploi du temps très chargé !
À presque 104 ans- elle les aura le 29 novembre - Émilie entretient précieusement sa vie sociale. « Pour voir du monde et jouer aux cartes. J’aime beaucoup. » Alors elle court, ou plutôt trottine doucement, sans canne. Depuis son quartier du Port, à la rue Paganini et au quai Saint-Jean-Baptiste pour se rendre à ses différents clubs. « Il y a encore quelques joueurs plus jeunes que moi. Ce ne serait pas bien de les laisser tomber. »
Où puise-t-elle une telle énergie ? « J’ai toujours travaillé. Ma retraite, je l’ai prise à 85 ans ! Avant j’étais couturière. D’abord à Paris où j’y ai passé cinq ans avant de revenir à Nice en 1933. Après la guerre, j’ai travaillé dans une maison de haute couture de Monte-Carlo qui n’existe plus aujourd’hui. Si vous saviez les belles robes que je confectionnais. En soie brochée ou en paillettes. Aussi les yeux m’ont quitté maintenant ! »
À 103 ans révolus, Émilie se désole de sa vue qui baisse. « À cause d’elle, je ne peux plus faire mes confitures de figues, de melons et de reines-claudes. »
« Jamais tête nue »
Entourée d’auxiliaires de vie et de sa nièce Myriam, qui lui rend visite, Émilie soigne toujours son élégance. La jolie robe à volant jaune à pois noirs qu’elle porte, oui c’est elle qui l’a faite. « Comme j’ai accessoirisé tous mes chapeaux. Car jamais je ne sors tête nue. » Coquette ? Oui elle l’avoue, mais sans chichi. « Je suis une fille de la campagne. De Toudon, plus exactement. Jusqu’à 80 ans, je courais la vallée de la Gordolasque pour cueillir les champignons. »
C’est aussi à Valdeblore qu’en 1940, elle a rejoint avec son mari, Franz, instituteur, la Résistance. « Moi je portais les plis à Lyon, Grenoble et Paris. Quelle histoire, à l’époque, pour prendre le train sans se faire prendre ! »
Depuis, elle suit avec assiduité l’actualité et met un point d’honneur à aller voter à chaque élection. « Parce que j’étais une suffragette ! Si vous saviez le mal que nous avons eues, nous les femmes, à obtenir le droit de vote. Ce n’est pas maintenant qu’il faut le laisser tomber ! »
source:nice matin